Dès la rentrée prochaine, en septembre 2014, les enfants
pantinois, comme tous les autres, iront en classe 9 demi-journées par semaine
au lieu de 8 actuellement. Cette réforme, issue de la loi Peillon de
refondation de l’école, visait à mieux répartir les temps d’apprentissage dans
la semaine en raccourcissant la journée.
Si les intentions sont louables, la presse s’est faite écho
des difficultés rencontrées dans les villes où la réforme est déjà mise en
œuvre. Pourquoi ? Parce que ces nouveaux rythmes ont été mis en place à
marche forcée et sans aucune concertation avec les parents, les enseignants,
les animateurs et les autres personnels communaux concernés. Sans compter la facture
pour les communes qui s’élève souvent à plusieurs centaines de milliers d’euros,
aide de l’Etat déduite.
Un simulacre de concertation
On pourrait penser que cette expérience ferait réfléchir les
communes qui ne l’ont pas encore mise en œuvre, à commencer par Pantin. Et bien
non ! Bertrand Kern a choisi le passage en force : il a d’abord
organisé un simulacre de consultation par carte T, pour demander aux parents de
se prononcer sur le choix du jour de classe ajouté, des horaires de classe et
de la date de mise en œuvre (2013 ou 2014). Résultats, certains parents n’ont
jamais reçu le document, il n’en a été adressé qu’un par famille (alors que
chaque parent est électeur pour désigner ses représentants), certaines réponses
étaient fortement orientées (si l’on choisissait 8h30 comme heure de début de
la classe, les enfants ne pouvaient pas rester à la cantine, si l’on
choisissait 9h, c’était possible…) et, excusez du peu, les résultats ont fait
l’objet de quatre publications (Canal d’avril 2013, site de la ville, lettre
aux parents et Canal de décembre 2013) donnant… 4 résultats différents !!
Devant les protestations des parents, des personnels
d’animation et des enseignants, M. Kern a pris, devant le Conseil Municipal le
4 juillet dernier, l’engagement d’étroitement associer l’ensemble de la
communauté scolaire à travers un comité de pilotage chargé de mener la
concertation indispensable au regard de l’enjeu de ce projet. Le 4 novembre
dernier, les représentants de parents étaient informés que la ville avait
choisi son organisation. Adieu engagements, promesses, concertation,
co-construction, communauté scolaire et le reste !
Des choix contestables
L’école devrait donc démarrer à 9h (contre 8h30) et finirait
à 16h15 (au lieu de 16h30). Les activités pédagogiques ? « Le midi en
même temps que la cantine ». Le contenu ? « On verra plus tard ».
Les locaux ? « Dormez tranquilles, on a tout calculé, même là où il
n’y a pas de centre de loisirs dans l’école ». L’accueil du matin ? « Les
petits matins calmes, une garderie » dans laquelle il concède ne pouvoir
organiser aucune activité pédagogique. Gratuit ? Bertrand Kern est « contre
la gratuité par principe », alors que le ministre de l’éducation vante à
coup de spots chèrement payés que la gratuité de cet aménagement des rythmes
renforcerait l’égalité à l’école. Cette
solution minimaliste va tout de même coûter 250 000 euros à la commune.
Pour quel apport ? Aucun.
Et pourtant, le besoin existe : 60% des enfants
pantinois ne participent à aucune autre activité d’éveil et de découverte en
dehors de l’école (centres de loisirs, école municipale des sports, clubs
sportifs, conservatoire, pavillon des beaux-arts…). Or, tout le monde est
d’accord pour dire que ces activités culturelles, sportives, ludiques,
d’éducation scientifique ou à la citoyenneté favorisent les apprentissages
scolaires. Si l’on ajoute que la proportion des enfants n’ayant aucune autre
activité que l’école est beaucoup plus forte dans les familles connaissant des
difficultés sociales, on a là une vraie politique publique de résorption des
inégalités, qui pourrait être ce que l’on attend d’un gouvernement et d’une
municipalité de gauche.
Il est encore temps de bien faire
Messieurs Peillon et Kern, il est encore temps de renoncer et
de remettre l’ouvrage sur le métier. La solution proposée à Pantin est un tour
de passe-passe minimaliste, sans ambition pédagogique (« il faut arrêter
de mettre de la pédagogie partout » nous dit le Maire), difficilement
réalisable (les « ateliers » du midi dureraient 40 minutes, ce qui rend
difficile, selon les animateurs eux-mêmes, le montage d’activités qualitatives
pour 20 minutes de temps réel).
Au PG, nous pensons :
- qu’une vraie réforme des rythmes scolaires doit être globale, de la semaine à l’année : la réforme du rythme de la semaine doit s’accompagner d’une réforme des vacances pour rendre l’année plus rythmée et régulière ;
- qu’elle doit permettre de proposer la même chose partout sur le territoire, et non selon le bon vouloir ou les moyens de la commune : l’éducation est nationale et doit le rester. Le lieu de résidence ne doit pas conditionner la qualité des enseignements et des activités proposées. Le dernier classement PISA le met en exergue : la France est le pays le plus inégalitaire de l’OCDE en matière d’éducation ;
- qu’elle doit se faire en co-construction avec l’ensemble des acteurs de la vie scolaire : cela demande de faire confiance aux enseignants, aux parents, aux animateurs, ATSEM, éducateurs sportifs, associations…, à leur capacité d’imagination, de conception, à leur expertise du quotidien pour proposer un dispositif partagé, ambitieux et efficace ;
- qu’elle doit partir du besoin de l’enfant, des conditions de sa réussite dans les apprentissages, de son épanouissement.
C’est pourquoi nous proposons la tenue de vraies assises de l’éducation à Pantin, qui
soient ouvertes à tous (acteurs ou non de l’éducation, l’école est un enjeu
républicain qui concerne tous les citoyens) et qui permettent de définir nos
ambitions communes, de mesurer les moyens qui nous manquent et de définir les
actions à mener dans les mois et années qui viennent. En faisant participer
tout le monde, on permet à chacun d’être ensuite encore plus acteur. Le temps
est fini où quelques « experts » isolés dans leur tour d’ivoire décidaient
de ce qui est bon pour le plus grand nombre !